Découvrez dans cet article les principes généraux concernant la déduction de l’impôt préalable.
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Nous poursuivrons avec ce thème dans les prochains jours avec deux nouveaux articles qui traiteront de la correction de la déduction de l’impôt préalable ainsi que de la problématique du changement d’affectation.
Déduction de l’impôt préalable
La déduction de l’impôt préalable est un élément très important en TVA.
Lorsqu’on parle de déduction de l’impôt préalable (=DIP), il faut tout de suite avoir le bon réflexe de penser aux charges, dépenses et investissements de l’entreprise. L’impôt préalable peut donc concerner aussi bien le compte de résultat (charges) que le bilan (investissements) d’une entreprise.
L’impôt préalable correspond donc, dans le jargon TVA, à la TVA qui est facturée à l’entreprise par ses fournisseurs sur leurs livraisons de biens et services. Il peut s’agir aussi bien de fournisseurs suisses que de fournisseurs étrangers. En principe, un fournisseur suisse ou étranger qui facture de la TVA le fait parce qu’il remplit les conditions d’un assujettissement à la TVA suisse.
Autant il est très important de bien qualifier les opérations, d’un point de vue TVA, afin de facturer et payer la TVA si elle est due à l’AFC (=revenus, chiffre d’affaires), autant il est aussi important voire même plus encore de connaître ce qui dit la loi TVA en rapport avec la déduction de l’impôt préalable, afin de ne pas récupérer à tort de l’impôt préalable (=dépenses, charges).
Lors de contrôle TVA effectués par l’AFC, il faut savoir que les corrections de l’impôt préalable représentent un montant de reprises très important.
Il s’agit donc d’être très vigilant lors de la comptabilisation des factures fournisseurs et plus encore lors de la comptabilisation de la TVA !
Principes généraux concernant la déduction de l’impôt préalable
Concernant la déduction de l’impôt préalable (=DIP), il est très important de noter ce qui suit :
Sous réserve des art. 29 et 33 LTVA, le contribuable TVA est autorisé à déduire, dans le cadre de son activité entrepreneuriale, les montants d’impôt préalable énumérés ci-après :
- La TVA grevant les opérations réalisées sur le territoire suisse qui lui a été facturée par des fournisseurs suisses ou étrangers inscrits au registre des contribuables TVA suisse
- La TVA qu’il a déclarée sur ses acquisitions, à la condition que ces dernières soient en rapport étroit avec la «réalisation» de chiffres d’affaires de nature imposable (exceptions : les chiffres d’affaires exclus et les subventions ne donnent pas droit à déduire l’impôt préalable)
- La TVA sur les importations acquittée ou due à l’AFD et, en cas de report du paiement de l’impôt, la TVA qu’il a déclarée sur ses importations
- Les impôts préalables fictifs en cas d’acquisition :
- d’un produit agricole, sylvicole, horticole, de bétail, de miel, de lait chez un agriculteur, un sylviculteur, un horticulteur ou un marchand de bétail ou dans un centre collecteur de lait non assujetti TVA
- d’un bien mobilier clairement identifiable sur lequel aucune TVA n’a été transférée de manière apparente, pour autant que ce dernier ne soit pas soumis à l’imposition de la marge (=biens, objets et pièces de collection uniquement, selon l’art. 48a OTVA)
Remarques importantes :
- l’impôt préalable ne peut être déduit que par les entreprises inscrites au registre des contribuables TVA. La réalisation d’une activité entrepreneuriale est primordiale pour obtenir l’assujettissement TVA
- une entreprise assujettie TVA peut néanmoins parfois exercer simultanément des activités entrepreneuriales et non entrepreneuriales
- seules les activités entrepreneuriales autorisent la déduction de l’impôt préalable
- les activités non entrepreneuriales ne permettent pas la déduction de l’impôt préalable
Exemple 1 :
Un boucher inscrit en raison individuelle exerce, à côté de son activité de boucherie, une activité salariée d’expert aux examens pour les apprentis-bouchers. Si le boucher enregistre en comptabilité des dépenses en rapport avec les examens professionnels (ex. : achat de papier, de matériel d’examen), il ne pourra pas récupérer l’impôt préalable sur ces dépenses, étant donné qu’elles sont en lien avec l’activité d’expert aux examens qui est définie comme une activité non entrepreneuriale par la loi TVA.
Exemple 2 :
Une association de bienfaisance, qui apporte un soutien alimentaire et financier à des particuliers dans le besoin, possède également un immeuble qui génère mensuellement des revenus de location soumis à la TVA (loyers facturés à des entreprises = activité entrepreneuriale). L’association, qui a été fondée initialement en vue d’atteindre un but idéal (aide aux personnes démunies), n’exerce pas dans ce but et vis-à-vis de tiers des activités qui viseraient à la réalisation, à partir de prestations, de revenus ayant un caractère de permanence (=activité entrepreneuriale). L’association reçoit régulièrement des dons et des subventions. Une partie des locaux (rez-de-chaussée) est affectée à l’activité caritative de l’association. Etant donné qu’une partie des locaux de l’immeuble est affectée à une activité non entrepreneuriale (=activité caritative financée exclusivement par des dons et subventions, sans réalisation de recettes ayant un caractère de permanence et imposable), l’impôt préalable ne pourra pas être déduit sur la partie de l’immeuble utilisée par l’association. L’impôt préalable pourra seulement être déduit sur la partie de l’immeuble dédiée aux locations à des entreprises.
Déduction de l’impôt préalable en lien avec la réalisation de chiffres d’affaires exclus
Dans le cadre de son activité commerciale ou entrepreneuriale, l’assujetti TVA peut également fournir des prestations qui, selon l’art. 21, al. 2, LTVA, sont exclues du champ de l’impôt.
A titre d’exemples fréquemment rencontrés en pratique, on peut citer :
- la mise à disposition d’immeubles ou de parties d’immeubles (studios, appartements, attique, duplex, etc.) à des fins d’usage ou de jouissance (location, affermage)
- la vente d’immeubles, de parties d’immeubles (appartements, studios, etc.)
- les prestations dans le domaine de l’éducation d’enfants et de jeunes
- les prestations dans le domaine de la formation
- les prestations de services culturelles
- les opérations d’assurance et de réassurance
- les prestations réalisées dans les domaines du marché monétaire et du marché des capitaux. Remarque : le commerce de titres (vente) est exclu (art. 21, al. 2, ch. 19, let. e LTVA) que lorsqu’il ne s’agit pas de participations (art. 29, al. 3 LTVA). Dès lors, lorsqu’il ne s’agit pas de participations, la déduction de l’impôt préalable sur les dépenses n’est pas autorisée (règle qui prévaut : les parts inférieures à 10% du capital ne sont pas considérées comme des participations).
ATTENTION : les dépenses servant à la réalisation de telles prestations ne donnent pas droit à la déduction de l’impôt préalable ! La réalisation de chiffres d’affaires exclus représente, en entreprise, la cause la plus fréquente de la non-déduction de l’impôt préalable. Il convient donc d’être extrêmement vigilant lorsque des chiffres d’affaires exclus sont réalisés par l’entreprise.
Exemple :
Un propriétaire d’immeuble qui habite à Lausanne loue, dans son immeuble situé à Montreux, des appartements locatifs à des privés. Ces loyers sont facturés sans TVA. Ces revenus de loyers sont enregistrés au crédit du compte de résultat de l’immeuble.
Dans le compte de résultat, au débit, sont enregistrées toutes les dépenses en rapport avec ces loyers ou qui ont été générées par les locations. Certaines dépenses ne sont pas grevées de TVA (ex. : amortissements de l’immeuble, assurances). Par contre, d’autres dépenses acquises auprès de tiers-fournisseurs sont clairement grevées de TVA, telles l’entretien, le chauffage, l’électricité, les rénovations, etc.
Etant donné que les dépenses de l’immeubles sont toutes en lien direct avec des loyers facturés sans TVA (=CA exclus), le propriétaire ne sera pas autorisé à déduire l’impôt préalable qui grève certaines dépenses (entretien, chauffage, électricité, rénovations etc.).
Moment exact de la déduction de l’impôt préalable
L’activité entrepreneuriale et l’inscription au registre des assujettis à la TVA sont des conditions indispensables pour prétendre à la déduction de l’impôt préalable. Les montants d’impôt préalable imputables aux activités non entrepreneuriales (c.-à-d. utilisation à des fins privées, activités relevant de la puissance publique, subventions, etc.) et aux prestations exclues du champ de l’impôt non imposables par option selon l’art. 22, al. 2, LTVA, ne donnent jamais droit à la déduction de l’impôt préalable.
Si une prestation, pour laquelle la déduction de l’impôt préalable a été opérée, est utilisée ultérieurement pour des prestations exclues du champ de l’impôt, un changement d’affectation doit être calculé. Ce calcul s’effectue au moment de la première utilisation (après le changement d’affectation) de la prestation acquise.
La déduction de l’impôt préalable peut être opérée aussi longtemps que la prescription n’est pas intervenue (art. 42 LTVA).
L’impôt préalable peut être déduit aux moments et instants suivants, selon les différents cas de figure existants :
TVA grevant les opérations sur le territoire suisse
Il faut distinguer entre les deux cas de figure suivants :
- Naissance du droit à la déduction de l’impôt préalable en cas d’établissement des décomptes sur la base des contre-prestations convenues (art. 39, al. 1 LTVA)
Lorsque le décompte est établi selon les contre-prestations convenues, le droit à la déduction de l’impôt préalable naît à la réception de la facture (art. 40, al. 1, LTVA). La date de facturation est généralement déterminante en ce qui concerne l’attribution de la facture à la période de décompte correspondante.
Cela ne change cependant rien au fait que le droit à la déduction de l’impôt préalable doit être prouvé par l’assujetti. Le paiement de l’impôt préalable doit être prouvé (art. 28, al. 4, LTVA). Si une facture n’est pas payée ou que le paiement ne peut pas être prouvé, le destinataire de la prestation assujetti doit alors entièrement corriger la déduction de l’impôt préalable qu’il a effectuée.
- Naissance du droit à la déduction de l’impôt préalable en cas d’établissement des décomptes sur la base des contre-prestations reçues (art. 39, al. 2 LTVA)
Lorsque le décompte est établi selon les contre-prestations reçues, le droit à la déduction de l’impôt préalable naît au moment du paiement de la facture (art. 40, al. 2, LTVA).
Déduction de l’impôt préalable en lien avec des factures de fournisseurs libellées en monnaies étrangères
Le décompte TVA doit être établi en monnaie nationale. Le fournisseur doit convertir en francs suisses le montant de la contre-prestation pour la prestation qu’il a facturée en monnaie étrangère au moment de la naissance de la créance fiscale (art. 45, al. 1, OTVA).
Il y a contre-prestation en monnaie étrangère lorsque la facture ou la quittance sont établies dans une monnaie étrangère.
Le taux de conversion applicable est, à choix, le cours mensuel moyen publié par l’AFC, ou le cours du jour des devises (vente). Les assujettis faisant partie d’un groupe de sociétés peuvent utiliser le cours de change interne du groupe pour la conversion (art. 45, al. 3 et 4, OTVA).
Le procédé choisi doit être conservé pendant une période fiscale au moins et il sera appliqué non seulement pour calculer l’impôt sur le chiffre d’affaires, mais aussi pour calculer l’impôt sur les acquisitions ainsi que la déduction de l’impôt préalable (art. 45, al. 5, OTVA)
En résumé, lorsqu’on évoque la déduction de l’impôt préalable (=DIP), il faut impérativement tenir compte des considérations suivantes avant de comptabiliser et déduire l’impôt préalable dans le décompte TVA :
- La facture du fournisseur remplit-elle les exigences formelles posées par la TVA ? (ex. : no de TVA du fournisseur, taux TVA, adresse du destinataire, etc.)
- Quelle est l’affectation de la facture ? (affectation à du chiffre d’affaires imposable, exclu, en lien avec des subventions, par exemple)
- Une affectation de la facture à du chiffre d’affaires exclu, à des besoins privés, familiaux ou à des subventions n’autorise aucune déduction de l’impôt préalable !
- Une déduction de l’impôt préalable ne peut en principe être envisagée qu’à la condition que les éléments ci-dessus ont été bien vérifiés avant !